Forêt et lieux de mémoire
Les curiosités de notre forêt
Le « Chêne Buffon », notre doyen
« Ecoute bûcheron, arrête un peu le bras !
Ce ne sont pas des bois que tu jettes à bas ;
Ne vois-tu pas le sang, lequel dégoûte à force,
Des Nymphes qui vivaient dessous la dure écorce. »
Pierre de Ronsard
Né au début du XVIIIe siècle, il est aussi âgé que le château de Serrigny. Ce vigoureux tricentenaire se distingue par des mensurations impressionnantes. En mai 1970, au cours d’une cérémonie bon enfant, quelque peu perturbée par les moustiques, on lui donna le nom du grand naturaliste bourguignon, Georges Louis Leclerc comte de Buffon, son contemporain, né en 1707.
L’étang du Bescia
Ce petit plan d’eau triangulaire niché dans son écrin de verdure, ne manque pas de romantisme. Son existence ne doit pas être antérieure au XIXe siècle ; on l’aurait aménagé à partir d’une fontaine.
Le pont de la Chargeole
Sous le Consulat, en 1802, à la demande de la commune de Serrigny, le bois de Bornotte a a été partagé entre les localités riveraines au prorata de leur population. Au sortir de la Révolution, il était devenu une forêt inextricable infestée de loups. Plusieurs décennies furent nécessaires pour l’aménager. Sous la Monarchie de Juillet, on empierra le chemin de Bavant, voie rectiligne qui traverse toute la forêt et rejoint l’ancienne voie romaine, encore appelée le « chemin ferré », l’actuelle D 20.
Au passage de la Chargeolle, modeste et intermittent affluent de la Bouzaise, il fallut construire un pont. Ce petit ouvrage présente une particularité. Sous sa voûte, quelques marches permettaient de s’approvisionner en eau. Une niche y est ménagée pour disposer une chandelle.
Feu le hêtre des résistants
Il avait fière allure, ce hêtre ou foyard. Son âge vénérable – 110/120 ans – lui donnait des dimensions respectables lui permettant de dominer un secteur du bois de Bornotte en limite de la forêt communale où il était qui plus est, l’unique représentant de son essence.
Pour ces raisons, les résistants de Serrigny en firent le repère afin d’enfouir début mars 1944, les containers parachutés dans la prairie de Corcelles. Un stockage qui ne fut que provisoire et, dès la fin du mois, le matériel non partagé fut dirigé vers diverses caches.
L’arbre dont l’écorce arborait des graffitis gravés par des anciens de la résistance poursuivit son existence, oublié. Ironie du destin, au printemps 2001, alors que l’on se souciait enfin, de préserver ce témoin des luttes contre l’occupant nazi, le géant ne retrouva pas sa feuillée. Force fut de constater après quelques mois, que le réchauffement climatique avait fait une nouvelle victime. Son emplacement est désormais signalé par une croix de Lorraine métallique.
Nos lieux de mémoire
Le monument aux morts
Le 25 mai 1919, le conseil municipal « soucieux de transmettre aux générations futures le souvenir des enfants de la commune morts pour la patrie pendant la guerre de 1914-1918. » a décidé l’érection d’un monument. Le financement a été réalisé par souscription publique et trois subventions municipales de 9.600 francs au total.
Edifié sur la place de Ladoix, il a été inauguré le 6 août 1922 sous la présidence de deux enfants du pays, le général Alphonse Nudant, ancien président de la Commission interalliée de l’Armistice, assisté de l’intendant général Victor Laurent.
Ce monument en marbre est une œuvre originale du sculpteur Paul Gasq (1860-1944), prix de Rome en 1884, grand prix de Rome en 1888 qui deviendra en 1932, conservateur du musée des Beaux-Arts de Dijon et, sera reçu en 1935, à l’Académie des Beaux-Arts. On lui doit une œuvre abondante et variée. Notons dans ce domaine mémoriel, d’autres monuments côte d’oriens : celui du cimetière de Serrigny évoqué ci-après, ainsi que ceux de Nuits-Saint-Georges, Dijon -un des bas-reliefs-, Pouilly-en-Auxois, Longchamp, Auxonne.
Un haut socle supporte la statue en marbre blanc d’un poilu en tenue d’hiver, au repos, portant l’arme à gauche, le pied droit posé sur un casque allemand. Sur son piédestal, sont gravés les 73 noms des tués de la Grande guerre et ceux des différents conflits du XXe siècle. Au total, 93 noms. L’ensemble repose sur trois degrés.
Quelques jours avant l’inauguration, les démobilisés de la commune déposèrent au niveau supérieur, un livre de marbre blanc, œuvre de M. Moreau.
En 1988, le socle en marbre présentant de graves signes de détérioration, on décida de le remplacer par une réplique en granite poli. Dans un souci de sécuriser les cérémonies qui risquaient d’empiéter sur la nationale, le poilu qui jusqu’alors, regardait Corton, fut réorienté dans l’axe de la place.
Au cimetière
Nous devons également à Paul Gasq un important groupe sculpté qui surmonte le monument funéraire de deux poilus : Henri Dauvernet, adjudant au 31e R.I, né le 5 mars 1885 à Paris, tué durant de la bataille de la Marne, le 7 septembre 1914, à Laimont [Meuse], et son oncle maternel Boniface Léon Mancins, sous-lieutenant au 231e R.I., né à Serrigny le 5 juin 1877, tué à Crouy [Aisne], le 12 janvier 1915.
Ce groupe en bas-relief repose sur un socle à deux niveaux, auquel on accède par deux marches. Il représente deux militaires en grande tenue portant leurs décorations, se serrant fraternellement la main devant le drapeau. A leurs pieds, un petit rameau de chêne se détache des palissades d’une tranchée. Sur le piédestal, la mention : « A leur mémoire et celle des enfants de la commune »
Au fond du cimetière a été édifié en 1922 un petit mémorial rappelant le sacrifice de 27 des 73 morts pour la France, probablement ceux dont les familles ont été en mesure de fournir une photographie. Une croix en fer forgé fichée dans un socle de pierre, sur laquelle sont fixées, dans un cadre métallique, les photos des victimes sur 25 médaillons de porcelaine.
Deux d’entre eux réunissent les photos de deux membres d’une même famille.
La mémoire des victimes du nazisme
C’est un tribut particulièrement lourd que notre commune a payé durant les heures sombres de l’Occupation nazie. En 1943, quelques patriotes déjà très aguerris dans les activités de résistance de la région beaunoise, se sont affiliés au B.O.A. [Bureau des Opérations Aériennes]. A leur tête, un jeune exploitant forestier de Corcelles, Maurice [dit Roger Gros]. Ce petit groupe a obtenu un parachutage effectué une nuit, début mars 44, sur la prairie de Corcelles, homologuée sous le nom de code « Linceul ».
Dans la perspective d’un débarquement des alliés, ces armes devaient équiper un groupe de destruction que rejoignirent plusieurs dizaines d’habitants de Serrigny et des communes avoisinantes. Mais du 6 au 8 juin, alors que cette formation commençait à être opérationnelle en participant au Plan vert, plusieurs interventions des forces répressives de l’occupant causèrent la mort de trois résistants et la déportation de 13 autres. Seulement quatre revinrent des camps de la mort.
En 2020, une stèle a été érigée à Corcelles dans l’espace Roger Gros, mémorial que viennent compléter des panneaux explicatifs sur les principaux lieux de ces tragiques évènements.
Le mémorial a été inauguré le 18 juin 2022